Que faire avant de dire « Ça ne marche pas » ?

Par Sophie Makonnen

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Se sentir bloqué·e au travail ne signifie pas toujours qu’on est dépassé·e. Parfois, il suffit de voir la situation sous un autre angle. Avant de faire remonter un problème ou de garder le silence trop longtemps, voici six questions pour avancer avec clarté et crédibilité.

Qu'ai-je déjà essayé ?

Cette question ne vise pas seulement à vous inciter à être actif·ive plutôt que passif·ive. Prenez le temps de dresser la liste de ce que vous avez réellement fait, non seulement dans votre tête, mais aussi clairement et par écrit.

  • Quelles mesures avez-vous prises?

  • À qui avez-vous parlé ?

  • Quelles actions avez-vous tenté de poser, et quel en a été le résultat ?

  • Quelles alternatives avez-vous envisagées mais pas mises en œuvre, et pourquoi ?

Cela ne sert pas uniquement à clarifier la situation pour vous-même. Cela vous prépare aussi à en parler avec assurance si vous devez en informer d’autres personnes. Vous démontrez que vous avez pris des initiatives, même si le problème n’est pas encore résolu. Vous ne communiquez pas de confusion, mais bien une situation sur laquelle vous avez travaillé et qui requiert maintenant un nouveau niveau d’intervention.

Si la réponse honnête est: « Je n’ai encore rien fait », dites-le. Éviter la réalité ne vous aidera pas à vous préparer. La reconnaître vous permet de vous demander : pourquoi pas ? Êtes-vous incertain·e ? Évitez-vous les conflits ? Attendez-vous une autorisation ?

Cette question n’a pas pour but de résoudre le problème, mais bien de faire le point sur ce que vous avez déjà tenté.

Qu’est-ce qui vous empêche d’avancer exactement ?

Parfois, le plus difficile quand on est bloqué·e, c’est de ne pas savoir pourquoi. Cette étape consiste à ralentir et à identifier ce qui empêche de progresser.

Commencez par chercher les facteurs internes et externes :

• Manque-t-il des informations ?

• Les responsabilités sont-elles mal définies ? Ne savez-vous pas qui est responsable de quoi ?

• Attendez-vous les commentaires ou l’approbation de quelqu’un d’autre ?

• Hésitez-vous, peut-être parce que l’environnement rend difficile d’agir sans avoir d’abord une autorisation ? Y a-t-il des règles tacites ? Avez-vous besoin de cette autorisation ?

Il s’agit de déterminer si vous êtes confronté·e à un obstacle ponctuel ou à une difficulté structurelle. Une fois que vous le savez, vous pouvez vous engager de manière plus stratégique et décider si la prochaine étape consiste en une conversation, une solution de contournement ou un ajustement des attentes.

Essayez d’identifier les prochaines étapes immédiates qui pourraient permettre de faire avancer les choses :

• Pour aller de l’avant, j’aurais besoin de l’avis de [l’équipe X].

• Cette étape nécessite généralement l’accord de [Y].

• Dans ce contexte, je n’ai pas le pouvoir d’agir seul·e.

• Je n’ai jamais vu ce genre de situation se produire à mon niveau auparavant, c’est pourquoi j’ai décidé de faire une pause.

Qui d'autre pourrait vous aider ?

Le soutien ne doit pas nécessairement venir de votre gestionnaire. En fait, certaines des solutions les plus efficaces sont élaborées de manière horizontale, et pas uniquement verticale.

Avant de faire remonter l’information, posez-vous les questions suivantes :

  • Ai-je consulté un·e collègue qui aurait pu vivre une situation semblable ?

  • Ai-je communiqué avec l’équipe ou le service qui pourrait contribuer à la solution ?

  • Ai-je cherché un précédent, un modèle ou un cas similaire qui pourrait m’aider à déterminer la marche à suivre ?

Il ne s’agit pas de faire le travail de quelqu’un d’autre, mais d’élargir votre champ de vision. Il arrive que certaines personnes s’habituent à travailler en silo. Il est alors question de relier les points, même si ces points se trouvent à l’extérieur de votre champ d’action immédiat.

Contacter à une autre équipe ou à un·e collègue démontre que vous faites preuve d’initiative. Cela montre que vous savez comment vous engager dans le système, et non simplement attendre que les décisions soient prises. Ce type de résolution de problèmes horizontale reflète souvent une forme d’initiative qui renforce la confiance et la crédibilité en matière de leadership.

Si vous essayez de faire appel à d’autres personnes et que vous vous heurtez à une impasse, il est tout de même pertinent d’en informer votre gestionnaire au bon moment. Cela montre que vous avez poursuivi vos efforts et aide à comprendre ce qui n’a pas fonctionné. Cela prouve aussi que vous avez fait votre part et que vous ne vous contentez pas de transférer le problème. Vous pouvez dire : « Voici ce que j’ai vérifié, voici à qui j’ai demandé et voici où je me suis retrouvé·e bloqué·e. »

Dans certaines organisations, cette démarche latérale peut être sensible. Évaluez bien le contexte et veillez à rester transparent·e sur votre approche, afin qu’il soit clair que vous cherchez à mobiliser du soutien — et non à contourner la hiérarchie.

Que recommanderais-je si j'étais mon patron ?

Il s’agit d’un changement de perspective. Cela signifie sortir de votre rôle habituel et examiner le problème dans un cadre plus large, avec une vue d’ensemble.

Posez-vous les questions suivantes :

  • Si j’étais responsable de la décision finale, que ferais-je ?

  • Quels compromis devrais-je envisager?

  • Quelles pourraient être les implications pour les équipes, les délais ou les priorités?

  • Quelles ressources seraient accessibles à ce niveau et que je ne perçois pas depuis ma perspective actuelle ?

Cette approche présente deux avantages clés. Premièrement, elle renforce votre pensée stratégique en vous amenant à considérer les impacts plus larges des décisions et à réfléchir comme une personne en position de leadership.

Deuxièmement, elle vous prépare à exercer votre leadership de façon plus efficace. Plutôt que de simplement soumettre un problème, vous pouvez proposer des solutions réfléchies et contribuer activement à la prise de décision.

Adopter une nouvelle perspective ne signifie pas que vous devez avoir toutes les réponses. L’objectif est de mieux comprendre le contexte global et de partager vos idées de manière pertinente.

Que puis-je faire au minimum pour stabiliser la situation (afin qu'elle ne s'aggrave pas) ?

Parfois, ce que vous essayez ne fonctionne pas.  Le problème peut être transversal, dépasser votre rôle ou dépendre d’acteurs qui ne réagissent pas. Néanmoins, une petite action peut souvent empêcher que la situation s’aggrave.

Posez-vous les questions suivantes :

• Y a-t-il une mesure à court terme que je peux prendre pour contenir le risque ou limiter la confusion ?

• Puis-je mettre en place une mesure temporaire, clarifier un élément ou documenter un problème ?

• Y a-t-il un moyen raisonnable de préserver la confiance ou de maintenir une communication ouverte, même si une résolution n’est pas encore possible ?

Ces mesures permettent de gagner du temps, de limiter les dommages éventuels et peuvent encourager d’autres personnes à s’engager en constatant qu’une première étape réfléchie a été posée.

Dois-je agir ou simplement informer ? (Y a-t-il des signaux d'alerte que je ne devrais pas ignorer ?)

Toutes les situations ne nécessitent pas d'être escaladées. Mais toutes les situations ne doivent pas non plus être passées sous silence. Ce qui importe le plus, c'est votre jugement.

Posez-vous les questions suivantes :

  • Est-ce quelque chose que je peux gérer ou est-ce quelque chose qui pourrait devenir un risque pour la réputation, le fonctionnement ou les relations si je ne m’en occupe pas ?

  • Est-ce que je signale cela parce que je vois des signes avant-coureurs, non pas parce que je souhaite que quelqu’un d’autre prenne le relais, mais parce que la direction doit en être informée ?

  • Est-ce que j’hésite parce que je ne veux pas surprendre mon·ma gestionnaire plus tard ? Et est-ce une bonne intuition à suivre dans ce cas ?

Dans ces situations, vous ne demandez pas nécessairement à votre gestionnaire d’intervenir. Au contraire, vous communiquez de façon claire et rapide. Par exemple, vous pourriez dire :

« Je gère la situation pour l’instant, mais je tiens à vous informer que [X] pourrait évoluer rapidement ou toucher des aspects qui nécessitent une coordination à un niveau de gestion plus élevé. »

Ou encore :

 « Cela semble gérable aujourd’hui, mais certains signes indiquent que cela pourrait dépasser le cadre de mes fonctions. Je vous en informe dès maintenant afin que nous puissions suivre cela ensemble, au besoin. »

Cela renforce la confiance envers vous. Vous démontrez que vous ne cachez pas les problèmes, mais que vous ne les transférez pas non plus lorsque ce n’est pas nécessaire. Vous tenez les autres informé·es, au lieu de leur faire porter le problème. Cela montre que vous faites partie de la solution. Vous ne résolvez peut-être pas tout, mais vous êtes une personne collaboratrice stable et fiable.

 

Ces six questions ne visent pas à tout régler par vous-même. Elles servent à rester engagé·e, à comprendre la nature du problème en le décortiquant et à vous préparer, que vous choisissiez de le résoudre seul·e ou avec l’aide d’autres perso

 
 

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