La confiance en soi : la compétence professionnelle à ne pas sous-estimer

Par Sophie Makonnen

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Le déficit de confiance : Pourquoi la compétence seule ne suffit pas

 « Nous sous-estimons l’importance de la confiance en soi. Nous la considérons comme un atout utile plutôt qu’une nécessité.  Nous accordons plus de valeur aux connaissances et aux ressources qu’à ce que nous percevons comme des compétences relationnelles. » (Traduction libre par Sophie Makonnen, où j’ai choisi de traduire "soft skills" par "compétences relationnelles") :   Brittany Packnett Cunningham, Ted Talk: “How to Build your Confidence…and spark it in others”.


Joy Burnford, dans Career Confidence and the Path to Leadership souligne un défi important présent dans le monde du travail : le manque de confiance en soi. Une étude réalisée par My Confidence Matters, une plateforme spécialisée dans la confiance en soi en milieu professionnel, le développement de carrière et le leadership s’est penchée sur les réponses de près de 2 500 professionnels. L’enquête a révélé que, bien que 85 % des femmes aspirent à des postes de direction, 79 % manquent régulièrement de confiance en elles au travail. Ce constat est en contraste frappant avec celui de leurs homologues masculins, dont les niveaux de confiance étaient supérieurs de 10 à 15 %. Pourtant, seulement 65 % des femmes ont déclaré que leur organisation offrait du coaching ou du mentorat. Comme ces services sont souvent réservés aux cadres supérieurs, de nombreuses femmes en début de carrière manquent d’un soutien essentiel.


Selon Katty Kay et Claire Shipman auteures de L'art de la confiance en soi : ce que les femmes devraient savoir, et Sally Helgesen auteures How Women Rise, plusieurs d’entre nous, notamment les femmes, avons été conditionnés à penser qu’en travaillant fort, en obtenant d’excellents résultats et en restant discrètes, nos réalisations seront automatiquement mises en évidence et valorisées. Il est facile de se laisser prendre au piège de croire que la qualité de notre travail devrait suffire à elle seule. Cependant, il faut reconnaître que l’expertise et les connaissances ne sont pas les seuls facteurs clés du succès. La confiance en soi est également un élément crucial. Kay et Shipman soutiennent que « la réussite dépend davantage de la confiance en soi que de la compétence ».

 

J’ai remarqué au fil de ma carrière que, que ce soit lors de négociations, de réunions de direction ou de discussions sur les carrières, la confiance ouvre des portes que la seule compétence ne peut pas franchir. Mais que se passe-t-il lorsque vous ne vous sentez pas confiant·e ? Vous avancez malgré tout — en dépit des sensations désagréables : la crainte que prendre la parole vous fasse paraître maladroit·e ou trop autocentré·e, l’angoisse que vos réussites soient non méritées ou simplement dues à la chance, et l’inconfort de quitter votre zone de confort, si rassurante et familière.

Parfois, c’est l’inconfort qui l’emporte. Nous optons pour la sécurité au détriment du risque. Nous nous retenons, nous choisissons de nous taire, ou nous décidons de ne pas saisir une opportunité — convaincu.es que ce n’est « pas le bon moment. » Ce n’est pas parce que nous manquons de compétence, mais parce que nous n’avons pas pu faire le saut. Cela peut arriver. Ça m’est arrivé. Cela fait partie du parcours.

Et d’autres fois, j’ai osé…..et je me suis ….. et bien cela n’a pas été un succès.  J’ai persévéré, parfois avec mon ego blessé, je dois l’admettre. Aujourd’hui, en écrivant ces mots, je souris.

Cela ne veut pas dire que la peur ou l’anxiété ont disparu. Cela ne signifie pas que le doute ne s’insinue jamais. Cela signifie avancer, malgré tout, parce que vous avez l’expertise. Vous avez l’expérience. Vous êtes prête. Vous persistez, même lorsque vous avez l’impression de nager à contre-courant. C’est cela qui fait toute la différence.

Parfois, la seule façon de retrouver mon équilibre était de « faire semblant », non pas sur le fond, mais sur la forme, — jusqu’à ce que la confiance suive. L’une des méthodes les plus efficaces pour y parvenir ? Beaucoup d’efforts. Je me préparais. Je sur-préparais même parfois. Parce que la préparation offre un socle solide sur lequel s’appuyer, même lorsque le doute tente de s’installer.. Et voila la perfectionniste en moi qui ressort, impossible de resister !  

Même des femmes très accomplies ont parlé ouvertement de leurs difficultés à avoir  confiance en elles.  C’était lors d’un panel sur CNN sur l’autonomisation des jeunes filles, Michelle Obama a révélé qu’elle avait souvent été confrontée au doute d’elle-même. Je me souviens d’un discours de Christine Lagarde lors de la Journée internationale des femmes 2023, où elle a dit : 

….. Je manque encore de confiance en moi, je vous assure. Je me souviens en avoir discuté avec Angela Merkel, qui m’a aussi confié qu’elle manquait de confiance—c’est pour cela que nous nous préparons souvent excessivement. 

Michelle Obama, Christine Lagarde, Angela Merkel… Peu importe leurs parcours ou leurs idées politiques, ce sont des femmes influentes qui ont marqué la scène mondiale. Et pourtant elles étaient là, partageant ouvertement leurs luttes avec la confiance en soi. J’étais en bonne compagnie ! 😊

Peut-être peuvent-elles parler aussi ouvertement parce qu’elles ont acquis de l’expérience et du succès, ce qui leur donne une certaine assurance. Elles sont à un point où elles peuvent reconnaître les doutes qui les ont traversées sans que cela ne mette leur place ou leur crédibilité en danger. Je les remercie sincèrement pour ce partage, car cela nous montre que nous ne sommes pas seuls.

Si des personnes aussi accomplies que celles-là ont connu ces doutes, que devons-nous en conclure ? Cela souligne également que le succès professionnel n’est pas synonyme d’absence totale de doutes, mais plutôt de persévérance face à ces incertitudes.

 

La bonne nouvelle, c’est que la confiance en soi n’est pas figée. Elle peut être acquise ou perdue, mais surtout, elle s’acquiert. Elle se développe avec le temps, les expériences vécues et la pratique, à l’image d’un muscle qu’il faut exercer régulièrement.

Voici le message que toutes les sources que j’ai partagées avec vous transmettent : les situations que vous trouvez difficiles deviennent graduellement moins ardues.

 

La confiance en soi ne repose pas uniquement sur vous ; elle dépend aussi du regard des autres

Nous entretenons une relation complexe avec la confiance en soi. Ce n’est pas un échec personnel ni quelque chose que vous pouvez imaginer.

 

Comme l’ont souligné les personnes que j’ai citées, il y a une autre dimension à considérer : il ne s’agit pas seulement de notre propre perception de nous-mêmes, mais aussi de la manière dont les autres nous perçoivent. La confiance en soi ne se construit pas dans le vide. Elle est façonnée par le regard que le monde porte sur nous et la valeur qu’il nous accorde. Lorsque la société valorise la confiance chez certaines personnes et la remet en question chez d’autres, il n’est pas étonnant que le doute s’installe en nous. Comme le souligne le Dr Valerie Young dans « The Secret Thoughts of Successful Women » : il est difficile de se percevoir comme pleinement compétent lorsque le monde ne nous perçoit pas ainsi. (Traduction libre de Sophie Makonnen.)

 

Les sentiments que nous éprouvons découlent souvent du fait que la confiance en soi n’est pas encouragée, ou pire, qu’elle est mal interprétée. L’affirmation de soi peut être perçue comme de l’arrogance, la détermination comme de l’agressivité et l’ambition comme une attitude oppressante ou trop insistante. Plus on s’écarte des stéréotypes dominants sur le leadership, plus il devient compliqué de faire face aux préjugés.

Il n’est pas surprenant que, même après avoir reçu des encouragements et de la reconnaissance, on puisse continuer à rencontrer des difficultés en matière de confiance en soi.

Ce défi est présent dans tous les domaines professionnels, et le développement international ne fait pas exception. Bien que ce secteur soit fondé sur des principes d’équité et d’inclusion, les structures de leadership reflètent souvent encore des dynamiques de pouvoir traditionnelles.

La confiance : lorsque le milieu de travail reflète au lieu de corriger

Le secteur du développement international repose sur l’expertise, les politiques et les données, avec une mission ancrée dans l’équité, la justice et l’inclusion. Ces dernières valeurs ne sont peut-être pas populaires partout aujourd’hui, mais je les défends, et je n’hésiterai pas à le dire.

J’ai appris au fil de mes années dans le développement international que la diversité du secteur ne garantit pas l’inclusion ni l’équité. En ce qui concerne l’avancement professionnel, ce secteur a tendance à reproduire les mêmes obstacles et préjugés que ceux du monde qu’il cherche à changer.

Les professionnel·les, en particulier les femmes, doivent naviguer dans les mêmes structures de pouvoir que celles que les programmes de développement prétendent démanteler.

  • Qui est reconnu·e comme expert·e ?

  • Quel type de leadership est bien accueilli, et lequel est rejeté ?

  • Qui est invité·e à la table, et qui doit se battre pour y rester ?

Quelles sont les conséquences ? La réalité est peut-être complexe, mais attendre qu’elle change rapidement ne fera pas avancer votre carrière. La vraie question est la suivante : que peuvent faire les professionnel·les pour renforcer leur confiance, surtout dans des environnements exigeants ?

Construire sa Confiance en Milieu de Travail

1.     Construire un réseau de soutien : entourez-vous de personnes en qui vous avez confiance, qui reconnaissent vos qualités et vous aident à les développer. Un·e mentor, coach ou collègue peut faire la différence.

2.   Se préparer et exceller dans son domaine : il n’y a pas de substitut à l’expertise et à la préparation. Restez curieux·se. Cultivez votre savoir-faire. La connaissance renforce l’autorité—et l’autorité nourrit la confiance.

3.     Agissez avant de vous sentir totalement prêt·e. La confiance se développe dans l’action, et non dans l’attente. Parlez de vos appréhensions avec un·e mentor ou collègue. Méfiez-vous aussi de votre critique intérieur·e, qui peut être un frein.

4.     Reprogrammer son dialogue intérieur : remplacez le doute par une approche axée sur l’action. Au lieu de vous poser la question « Suis-je prêt·e ? », demandez-vous plutôt « Comment puis-je contribuer ? » La confiance, c’est avoir du courage, non des certitudes.

5.     Ancrer sa confiance dans ses compétences : Rappelez-vous d’où vous venez et des réalisations dont vous pouvez être fier. C’est votre expertise qui constitue votre fondation.

6.     Prendre sa place : La confiance, c’est aussi une question de présence. Tenez-vous droit·e. Regardez les gens dans les yeux. Parlez avec conviction. L’attitude compte.

La confiance en soi est indispensable dans l’évolution professionnelle. Elle ne relève pas du superflu, mais plutôt d’une exigence. Heureusement, elle peut être cultivée. Et surtout, vous n’êtes pas seul·e.

Alors, osez vous mettre en avant, même quand cela fait peur. Cela deviendra plus facile avec le temps et la pratique. Je vous assure que ça en vaut la peine.

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